La notion de « Pervers Narcissique » est rentrée dans le langage courant parfois à tort et à travers. Quelqu’un nous manipule, nous ment, nous culpabilise et nous avons vite fait de clamer « c’est un pervers narcissique », PN pour reprendre l’abréviation.
Si derrière cette notion on retrouve une problématique très grave et très destructrice qui ne doit pas être négligée, il est néanmoins important de l’utiliser avec rigueur et prudence.
Les gens qui manipulent pour le plaisir de détruire ne remplissent pas les rues comme on pourrait le croire.
Oui mais alors, comment faire le tri ?
Comment être sûr(e) de discerner une manipulation circonstancielle d’une façon d’être ?

C’est ce que nous allons tenter d’éclaircir à travers cet article qui se découpera aussi en deux volets.

Dans le premier volet, nous allons faire la distinction entre le manipulateur occasionnel et le PN. Dans le cas d’une perversité narcissique, nous allons brosser les profils de personnalité tant du pervers que de sa victime. Nous verrons également les moyens utilisés pour manipuler et les conséquences sur l’individu qui les subit.

Dans un deuxième volet (édition de juin 2018), nous analyserons la mise en place d’une relation toxique, les éléments pouvant déclencher « les crises ». Nous nous centrerons également sur comment gérer ces crises et finalement comment sortir de cette spirale infernale.

La personne « ordinaire » qui dérape…

Petite remarque préalable avant d’aborder ce chapitre.
Pour paraphraser Paul W, toute communication est une manipulation.

Imaginer que vous êtes seul(e) dans une salle d’attente, vous vous mettez à l’aise sur le siège.
Quelqu’un d’autre rentre et vous vous surprenez à vous redresser et à prendre une posture moins avachie.

La simple présence de l’autre, alors qu’il n’a encore rien dit, a eu instinctivement une influence sur vous.

Lorsque nous argumentons dans un débat, nous cherchons aussi parfois à influencer l’opinion de notre interlocuteur. Jusque-là, rien de bien méchant.

Le premier élément clé, sera donc l’intention présente derrière notre communication.

Prenons un exemple plus douloureux:

Vous avez vécu heureux en couple durant plusieurs années, chacun avait du respect pour la personnalité de l’autre et l’idée que votre conjoint(e) soit PN ne vous aurait jamais traversé l’esprit. Doucement le désamour s’est installé chez un des deux membres du couple, peut-être même il y a-t-il une liaison sur le côté… Et soudain, vous ne reconnaissez plus l’autre : il vous ment, vous culpabilise, vous fait tourner en bourrique…
Est-il pour autant pervers narcissique ?

Qu’est-ce qui se joue alors ?

Nous sommes tous un peu névrosé(e) et avons tous des blessures dans nos bagages.
La manipulation sert ici de moyen pour cacher autre chose (le désamour, un problème dans le couple, …).
Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : toute manipulation peut être dévastatrice et douloureuse et ce, qu’elle soit issue d’une personnalité perverse ou non !

Ici nous avons à faire à des personnes qui ont été capables d’amour et d’empathie, qui sont toujours aptes à l’empathie dans d’autres secteurs de leur vie mais qui, suite à une blessure, entrent dans un schéma de manipulation. Il s’agit souvent d’une accumulation de non-dits, de colère larvée, de frustrations qui se manifestent ainsi de façon destructrice.

Les paroles cassantes ne viennent pas nécessairement de la nature de la personne mais du contexte.
Les mobiles sous-jacents tournent généralement autour des axes suivants :

  • Cacher quelque chose : ne pas vouloir montrer que l’amour s’est éteint, cacher une liaison, ne pas avouer une perte de désir pour l’autre. Mais aussi cacher des problèmes financiers, des dettes de jeu, une consommation excessive d’alcool ou d’autres substances.
  • Vouloir transformer l’autre : on n’ose pas demander ni exprimer ses besoins alors on agresse, on mitraille de critiques, on dévalorise.
  • Empêcher l’autre de partir : quitte à utiliser le chantage, les menaces de suicides, la voie royale de la culpabilisation.
  • Amener l’autre à partir : on n’a pas le courage de mettre un terme à la relation, on met alors l’autre à bout pour qu’il/elle prenne lui-même la décision.
  • Se venger en faisant du mal à l’autre, en le dévalorisant à l’extérieur.

Tentons donc un premier diagnostic différentiel

Dans ces cas cités, les actions posées ou les paroles toxiques exprimées ne caractérisent pas l’ensemble de l’individu mais un moment de sa vie. Elles peuvent s’interrompre et disparaître ensuite. Il s’agit d’un moyen, certes maladroit, destructeur et bien souvent inutile, pour obtenir ce qu’on veut. « À travers la destruction de l’autre, je veux réparer une blessure ». On est dans la catégorie des névrosés et tous types de personnalité peut un jour endosser ce vêtement toxique à un moment donné de sa vie.

Dans le cas du PN : c’est sa structure de personnalité qui est en jeu et qui va se retrouver tout au long de la relation une fois sa victime sous sa coupe. Les tendances manipulatrices jalonnent tout son parcours de façon incurable. Le but du PN n’est pas d’obtenir quelque chose mais clairement d’anéantir l’autre. La manipulation n’est dès lors plus un moyen, elle est le but défini. « À travers la destruction de l’autre, je nourris ma valeur ». D’où la notion de vampirisme souvent utilisée. On est ici dans des types de personnalités borderline. À savoir dans la zone frontière entre le normal et le pathologique, entre névrose et psychose. L’être habitant cette zone a un masque de normalité mais sa capacité à être en lien est fortement altérée, instable, pathologique ;
Dans cette zone, il oscillera entre un sentiment de supériorité grandiose et un sentiment de vide intérieur abyssal que seul l’anéantissement de sa victime viendra calmer. C’est comme s’il se remplissait de tout ce qui fait vie chez l’autre : ses désirs, ses projets, sa bonne humeur…

Dans le premier cas, les effets peuvent être destructeurs mais sont souvent temporaires.
Dans le deuxième cas, il s’agit d’une véritable entreprise de démolition psychologique dont la victime ne sortira que par instinct de survie. Il lui faudra beaucoup de temps pour se reconstruire et retrouver l’estime de soi.

Dans le premier cas, le but est parfois de faire partir l’autre.
Dans le deuxième cas, le PN ne veut aucunement lâcher sa proie, il en est tout aussi dépendant que sa victime ne l’est de lui. Il a une hantise viscérale de l’abandon. Pour ne pas la vivre, il est prêt à emprisonner l’autre complètement.

Le pervers narcissique plus en détails

Je précise d’emblée qu’il peut s’agir d’une femme comme d’un homme.

Ici, on se retrouve dans une structure de personnalité bien installée : on peut le rencontrer dans sa vie familiale, professionnelle ou de couple.

Son projet est clairement de vous anéantir : à chaque fois qu’il brise l’estime que vous avez de vous-même, il gonfle sont sentiment de supériorité.
Ceux qui ne sont pas avec lui seront clairement diabolisés.

Ne vous sentez pas stupide si vous en avez été victime, ce n’est pas une question d’intelligence et d’ailleurs le PN adore les personnes rayonnantes, intelligentes, de qualité : le jeu en sera d’autant plus palpitant à ses yeux. Sa jouissance à éteindre quelqu’un d’enjoué sera décuplée.
Quitte à vampiriser, ils préfèreront un sang au goût de champagne plutôt qu’avec un goût de piquette.

Le point de départ : un(e) prince(sse) particulièrement charmant(e)… qui sort carrément du lot. Cet individu aura tôt fait de créer la connexion avec vous et de vous faire croire que vous êtes connectés tous les deux. Vous vous délectez alors de se sentiment d’avoir enfin trouvé la perle rare.
Bref le début est magique, il/elle vous encense !
Car le PN n’agit pas de manière frontale, il avance masqué, en souterrain, l’air de rien : le crime sera parfait.

Il a l’art de cumuler plusieurs profils :

  • Un côté séducteur axé sur le paraître avec une volonté d’amener l’autres dans son sillon.
  • Un côté victime pour attirer la compassion et la sollicitude de l’autre : ils sont si malheureux et ont vécus tant de douleurs.
  • Un côté surnaturel, magique : il dégage tellement d’assurance qu’on a le sentiment qu’avec lui tout sera possible.
  • Un côté grand sauveur qui va vous protéger des tous les autres qui bien sûr sont mauvais alors que lui ne veut que votre bien…
  • Un côté psychorigide (par exemple sur le rangement).
  • Un côté bourreau et sadique dont sa victime fera de plus en plus les frais.
  • Un côté acteur : le PN ne connaît ni empathie ni culpabilité mais il peut feindre toute la gamme d’émotions si cela peut servir ses desseins.
  • Un côté harceleur, insistant.
  • Un côté flou, difficile à cerner.
  • Un côté vampire qui va vider l’autre de toute substance vitale.
  • Un côté immature : l’enfant qui veut tout, tout de suite et ne supporte aucune frustration.
  • Un côté jouissif…lorsqu’il vous met dans un état de terreur pour ensuite vous amadouer.
  • Une incapacité à se remettre en question : il n’est jamais coupable de quoi que ce soit.
  • Une identité clivée : un mélange de Dr Jekyll et Mister Hyde, selon les moments ou selon les sphères de vie (travail, amis, couple…).
  • Un côté calme et posé qui n’est autre qu’une froideur implacable

Car s’il est bien deux choses que le PN manie à merveille c’est le paradoxe et l’alternance de « paradis-enfer », de chaud-froid.

Qui est sa proie ?

Comme je l’ai dit plus haut, une personne plutôt pétillante, avec une certaine joie de vivre, vitalité, empathie (elle en aura d’ailleurs pour deux), bienveillante, accomplie professionnellement et avec des valeurs humaines bien présentes. Et si au passage sa proie a du répondant et est intelligente, c’est d’autant mieux.

Avec une faille cependant dans laquelle le PN viendra s’emboîter :

  • Soit la personne est dans un moment de vie difficile où elle vient de subir une perte.
  • Soit derrière le masque enjoué se trouve une personne en mal d’amour avec un manque de confiance en elle ou en recherche de reconnaissance.

C’est dans une de ces brèches que l’individu PN fera une entrée triomphante.
Il paraît si solide et si sûr de lui que l’autre aura envie de s’appuyer sur lui.

En gros ce sera la rencontre entre une personne narcissique à souhait et une personne aillant une faille narcissique.

Les armes utilisées

Dans les deux cas, l’arme fatale utilisée est le langage. Un langage qui va brouiller notre cerveau et nous faire douter de nous-mêmes.

Moyens fréquemment utilisés :

  • La culpabilisation : mettre la faute sur l’autre.
  • Le retournement de situation, la mauvaise foi.
  • Généraliser avec les « toujours » et les « jamais ».
  • Faire des reproches et humilier devant d’autres personnes engendrant un sentiment de honte.
  • Proférer des menaces engendrant ainsi un sentiment d’insécurité.
  • Rappeler tout ce qu’on a fait pour l’autre engendrant ainsi chez l’autre un sentiment d’être en dette.
  • Les interprétations sauvages : « Tu es complètement malade ».
  • Les crises de jalousie.
  • Faire un tas de promesses qu’on ne tiendra jamais.
  • Générer de la confusion en envoyant des messages paradoxaux.
  • L’instabilité d’humeur pour désarçonner.
  • Les sous-entendus.
  • Le chantage affectif voire le chantage au suicide.

Concernant ce dernier point, je parle bien de menace de suicide faite dans le but de retenir l’autre. Je ne parle pas des personnes qui décident de mettre un terme à leur vie car elle leur semble trop douloureuse. Se suicider est alors un moyen de mettre terme à la souffrance et n’est pas dirigé contre une personne.

L’impact sur les victimes

Dans les deux cas, on retrouvera des souffrances similaires chez la personne qui reçoit la manipulation :

  • Une impression de confusion interne et une perte de confiance en son ressenti.
  • Une anxiété permanente.
  • L’impression que l’avenir est un tunnel bouché.
  • Un sentiment de culpabilité excessif.
  • Des sentiments de tristesse, l’impression d’être « rien ».
  • Parfois des explosions de colère (qui se retourneront en général contre elle).
  • Des troubles somatiques divers et invalidant : troubles digestifs, maux de tête, troubles du sommeil et de la concentration, douleurs dans le corps.
  • Un épuisement moral voire un état dépressif majeur.
  • Un sentiment de ne pas être pris au sérieux par les autres.
  • Un isolement social progressif.

Bref, les effets dévastateurs sont légions.

Comment en sortir ?

Nous verrons ce point plus en détails dans le deuxième volet de cet article.
Voici juste quelques pistes en avant-goût :

  • D’abord se rendre compte qu’on est manipulé.
  • Réaliser que la situation n’est pas normale ni acceptable.
  • Accepter de ressentir de la colère.
  • En parler, voire chercher de l’aide auprès d’un professionnel.
  • Mettre ses propres limites.
  • Si un dialogue sain est finalement possible (ce qui n’est pas le cas avec un PN), voire les raisons qui ont conduit à ce marasme.

Conclusion

Si la manipulation peut être toxique, il est essentiel de pouvoir faire preuve de discernement et de ne pas voir le monde peuplé de pervers narcissiques.
Néanmoins, les conséquences sont importantes et ne doivent en aucun cas être négligées.
Ne laissez pas votre vie et votre potentiel se perdre dans des relations toxiques.
Qu’il s’agisse de manipulation temporaire ou d’un processus de destruction massive, osez en parler, osez demander de l’aide, donnez-vous la permission d’une vie plus respectueuse.

Que la force de vivre vous accompagne !

Florence
Pour potentialiser votre bien-être et vous aider à devenir la meilleure version de vous-même !

Florence Bierlaire

Florence Bierlaire

  • Psychothérapeute (Thérapie systémique- Hypnose Ericksonienne- ANC)
  • Sexologue clinicienne
  • DU sur les troubles du comportement alimentaire à Paris
  • Tabacologue
  • Auteure

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