Souvent mal perçue, une colère saine a pourtant son utilité et est un signe indicateur d’un besoin non satisfait.
Refoulée, elle prendra différents visages et sera alors franchement destructrice.

Comment l’identifier et surtout comment identifier ses formes dérivées ?
Comment l’exprimer sans se détruire, sans détruire l’autre ?

C’est ce que je vous propose d’explorer dans ce nouvel article.

Qu’est-ce que la colère ?

Elle fait partie de nos émotions de base depuis notre naissance, c’est donc une réaction tout à fait humaine et que l’on retrouvera partout à travers le monde quelles soient les cultures.

C’est une émotion « chaude », vive qui donne envie d’hurler et qui sur le plan physiologique s’accompagne de diverses sensations comme une accélération cardiaque, une tension extrême. Mais pas de panique, si elle est saine, elle saura mettre ses limites d’elle-même.

Enfin, elle est essentiellement due à un sentiment d’injustice ou de manque de respect (réel ou interprété comme tel).

Même si vous vous en défendez, on a tous connu un jour ou l’autre cette émotion 😉
Néanmoins, la façon dont nous allons y répondre sera très variable d’un individu à l’autre.

Vivre de façon équilibrée implique l’autorisation de ressentir toute sa gamme émotionnelle y compris la colère. Malheureusement, certaines personnes ont intégré durant leur enfance que ce n’était pas bien, que ce n’était pas une émotion appropriée, accueillie avec amour. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas ici de culpabiliser les parents, ils ont fait de leur mieux ! Simplement la plupart des enfants grandissent avec le sentiment que s’énerver est dangereux et susceptible de les priver d’amour.

Pourtant une colère, à l’origine, est quelque chose de simple qui ne comporte aucun risque de déraper. Si elle éclate de façon dangereuse, c’est qu’une accumulation insidieuse a déjà eu lieu à l’intérieur et que c’est cet amas qui prend feu.

Si nous sommes attentifs à nos émotions, la colère incluse, nous possédons toujours en nous la possibilité de contrôler les choses.

Même non exprimée vers l’extérieur, il est essentiel de la reconnaître et de l’accepter.
Je parle bien de ressenti ; en effet il ne faut pas confondre l’émotion et ce que l’on en fait !

L’idéal étant de pouvoir exprimer assez rapidement ce que l’on a vécu.
Souvent nous sommes plus enclins à la ressentir avec nos proches et pour cause, une colère saine signe un intérêt véritable pour l’autre. Elle signifie que la relation est importante et que l’on souhaite trouver une solution à ce qui s’est passé.

Une colère saine est toujours momentanée.

Si la colère d’un de vos proches vous semble complètement disproportionnée et irrationnelle, sachez que d’une façon ou d’une autre, elle a toujours un sens même si celui-ci est peu compréhensible.
Si elle prend des proportions démesurées, c’est qu’elle prend racine dans un bourbier intérieur parfois très lointain.

Vous me direz ok, mais alors comment savoir si c’est une colère saine ou une colère déviée ?

Voici quelques indices pour vous aider à y voir plus clair :

Une colère saine…

  • le laps de temps entre l’événement, la sensation de colère et son expression est    relativement court.
  • peut être vive, chaude et intense mais elle est surtout ouverte, directe, facile à comprendre.
  • le langage peut être dur mais prend rarement des allures de vendetta, de sadisme, de mots qui « tuent ».
  • est courte et limitée et le pardon vient généralement assez vite
  • elle nous aide à mieux nous connaître et à mieux identifier nos besoins une fois l’orage passé et analysé.
  • elle aide la relation à grandir, à progresser
  • elle fait partie de l’amour

Une colère n’est pas saine et est trafiquée si :

  • elle est froide
  • elle détruit tout sur son passage
  • elle est revendicative et vengeresse
  • elle s’exprime au travers de différents poisons relationnels
  • elle est sadique et corrosive
  • si aucun échange émotionnel positif ne peut en sortir
  • si elle dure et s’ajoute à d’autres sentiments de haine déjà sérieusement accumulés
  • si elle saccage l’estime de soi, la confiance en soi, voire même toutes relations sociales
  • elle est l’opposée et l’ennemie de l’amour

Mais qu’est-ce qui peut dénaturer notre colère pour en faire un poison toxique ?

L’éducation reçue ou en tout cas la façon dont nous l’avons intégrée va jouer un grand rôle.
Le résultat peut donner ce genre de postulat :

« Je veux paraître quelqu’un de bien en toutes circonstances, je ne veux pas faire d’histoire. »

Être en colère détruirait ainsi l’idéal que la personne a d’elle-même.
La moindre trace d’irritation ou d’agacement ruinerait sa sensation d’être une chouette personne.
Pour ce type d’individus, la colère est automatiquement une menace qui va être vite refoulée. Le prix à payer à long terme et en énergie peut être énorme.

« En aucun cas, je ne veux montrer que ça me touche et que je suis blessé(e) »

À force de ne vouloir montrer aucune vulnérabilité, la personne va par la même occasion se blinder et se priver de toutes relations sincères et chaleureuses.
Cette répression va aussi engendrer de nombreux dégâts au sein de l’organisme.

– « Pour moi, tout doit rester sous contrôle »

On a alors à faire à des personnes qui ont besoin de tout contrôler pour se donner une illusion de sécurité ou par souci de perfectionnisme…ou les deux 😉

« Si j’exprime ma colère, il/elle ne m’aimera plus »

Ici, c’est la crainte du rejet ou de l’abandon qui va cadenasser la colère jusqu’au jour où…

Mais que devient alors la colère lorsqu’elle n’a pas su s’exprimer à temps ?
Quelles formes peut-elle prendre ?

Les autres masques de la colère

Le refoulement :

Précisons d’abord que le refoulement peut être conscient ou inconscient.
Il est conscient lorsque la personne se rend compte de ce qu’elle ressent mais fini par le freiner par un discours « dédramatisant ».

Ex : « Oui ok, suis un peu en colère mais dans deux minutes ce sera fini, je me connais ! »
« Un petit footing et on en parle plus »
« Un petit verre et ça passera »

Il est inconscient lorsque l’on s’est tellement entraîné à ne plus ressentir cette émotion, qu’elle n’a même pas le temps d’être connectée. Le refoulement est instantané et se fait de façon automatique. Il est le fruit d’un conditionnement bien rodé.
Le discours de la personne peut alors donner ceci :

– « Moi, la colère ? Ne connais pas ! »
– « La colère ça sert à rien du tout, pourquoi je mettrais mon énergie là-dedans »

La postposer…:

…dans l’espoir qu’elle s’évapore d’elle-même…
Malheureusement, c’est rarement le cas, en général elle vient alimenter un de nos tiroirs intérieurs…Jusqu’à ce que ce dernier soit plein et explose.
Autre conséquence : ruminer inlassablement ce qui s’est passé.

Le déplacement…:

…sur quelqu’un d’autre bien sûr !
On n’a pas osé dire ce que l’on pense à la personne concernée ?
Qu’à cela ne tienne, on va tout déverser sur une autre personne, ou sur autre chose ! Autre personne ou autre chose que l’on redoute moins, évidemment.
Et voilà une personne innocente qui va en prendre plein la tronche sans rien comprendre à ce qui lui arrive.
De vieilles blessures peuvent ainsi rejaillir sur des proches tout au long d’une vie.

Autres conséquences possibles :
– Devenir aigri, cynique, méprisant avec les autres en général
– Déplacer la colère contre soi, se haïr et sombrer dans un état dépressif chronique

Du râleur permanent au muet intermittent:

Deux autres masques : on aura la personne dont le verbiage sera important et essentiellement axé sur le fait de tout critiquer ou on aura la personne qui s’enferme dans son mutisme tout en niant qu’elle est fâchée (« je ne suis pas fâchée, j’ai juste pas envie de parler ! »)

Dans le même ordre d’idées, on aura la médisance : la personne évacue l’air de rien sa colère en offrant des rumeurs malveillantes à son public

La mimer :

– Soit la personne en parle sous prétexte de bien communiquer mais en fait elle ne la ressent pas, elle s’en est coupée. La colère reste donc un discours théorique.

– Soit la personne la joue mais ne parle pas vraiment de ce qu’elle ressent au fond d’elle.

La fatiguer…:

…au travers un surmenage ou un surinvestissement intellectuel, sportif, voire même une hypersexualité.
Derrière ces excès, se cache souvent beaucoup d’agressivité accumulée et non dite.

Manipuler l’air de rien par un langage indirect :

« Passe une bonne soirée, amuse-toi bien, j’espère que je n’aurai pas un malaise durant ton absence car je ne suis pas en forme aujourd’hui »

Ici la culpabilisation se cache derrière un noble souhait « passe une bonne soirée »
Souvent ce type de langage est utilisé par des personnes qui ont du mal à reconnaître certains sentiments. Le langage indirect permet également de se dérober si l’autre réagit mal : « Pourquoi tu t’énerves ?, je te souhaite une bonne soirée et tu me mords le nez ! »

La mettre sur la route.

Et oui, phénomène très connu et ayant fait l’objet de nombreuses expériences scientifiques 😉

Dans ce cas, on défoulera dans un embouteillage, en sécurité dans sa « boîte » en métal, toute la colère accumulée que l’on a en soi. Colère envers sa direction, son/sa partenaire, les frustrations de la vie…

Jouer l’honnêteté … :

…mais pour exprimer exclusivement des vérités qui font mal…
Ces personnes recherchent les scoops qui blessent, nient la colère émise à travers cela en évoquant la valeur de la sincérité.

Ex : « C’est par honnêteté que je te dis ça, c’est pour ton bien »

La vivre au travers des rêves de la nuit :

Là, c’est l’inconscient qui fait son travail et prend la relève pour évacuer au mieux tout ce marasme émotionnel et ce au travers de nuits agitées, de cauchemars où la violence se déchaîne allègrement.

Ces rêves s’estomperont dès que la personne aura pris conscience de ses émotions et de ses besoins.

Faire des plaisanteries de mauvais goût :

Là aussi, la colère va s’évacuer au travers de moqueries mesquines, vulgaires voire carrément méchantes mais où c’est la victime qui sera cataloguée de ne pas avoir le sens de l’humour!

Voilà pour quelques-unes de ses dérives possibles.
Mais que devient –elle lorsqu’elle ne s’évacue pas du tout vers l’extérieur ?

Lorsque la colère reste coincée à l’intérieur !

Si la personne cadenasse complètement sa colère et empêche toute évacuation vers le monde extérieur, cette dernière va alors ravager l’organisme et l’esprit de l’individu :

La crise d’angoisse : la personne a peur de sa colère, craint de ne pas la maîtriser et c’est in fine l’angoisse qui fera son apparition avec son cortège de sensations désagréables.

La dépression : elle peut être le résultat d’une colère qu’on n’a pas voulu exprimer et que l’on a retournée contre soi. Je tiens à préciser qu’une dépression peut avoir plein d’autres causes autre que la colère.

Des troubles du comportement alimentaire : souvent destructeurs, ils signent aussi une agressivité dirigée vers soi-même. Que ce soit astreindre son corps à ne pas manger ou le nourrir jusqu’à l’explosion, dans les deux cas, il faut une fameuse dose de culpabilité, de manque d’amour de soi…

L’insomnie ou son opposé l’hypersomnie : là les ruminations incessantes liées à  la colère peuvent soit créer une agitation telle que le sommeil peine à venir, soit entraîner le refuge dans le sommeil. Si le lien est fait et traité, la personne sera considérablement surprise de récupérer un sommeil réparateur et le plein d’énergie 😉

Obsessions, compulsions, phobies : ces troubles peuvent aussi cacher beaucoup de colère interne.

Auto-sabotage : aussi lié à cette haine de soi, cette colère redirigée contre soi

Ex : accidents récurrents, chutes nombreuses, mise en échec répétitive dans le travail…

Maladies psychosomatiques : hypertension, ulcères à l’estomac, migraines, douleurs diverses, problèmes d’eczéma, difficultés à respirer, problème chronique de sinus…
Une fatigue importante et durable peut aussi se manifester.

Petite parenthèse : la colère peut aussi trouver sa façon de s’exprimer au travers de la sexualité. Les problèmes de douleurs, d’éjaculation ou d’érection qui apparaissent soudainement sans explication physiologique sont souvent une manière détournée de « ne pas faire plaisir à l’autre » car fondamentalement on lui en veut pour quelque chose d’autre.

Le pire du pire :

Dans le cas d’une compression extrême, la colère devient alors mortelle.
En atteste de nombreux cas de suicides, de meurtres, de violence, de pères ou de mères qui tuent leurs enfants pour ensuite retourner cette haine contre eux en mettant fin à leurs jours.

Conclusion :

Une petite dispute franche, claire, directe en lien avec le réel du moment, sans déformation ou retour à l’époque de la préhistoire, est parfaitement saine.

Ressentir ses émotions y compris la colère n’est ni bien, ni mal, c’est humain et essentiel à la vie.
Vous ne pouvez pas vous en vouloir de vos émotions, par contre, il s’agira d’observer ce que vous en faites pour éviter qu’elles vous tuent à petit feu ou détruisent tout autour de vous.

Reconnues et accueillies, vos émotions de colère ne seront jamais dangereuses et seront vite passées. Le pardon pourra alors prendre simplement sa place.
Une colère saine ne tuera personne et ne détruira pas les vrais liens.

Niées, refoulées, déviées, vos émotions de colère auront tôt fait d’anéantir quelque chose que ce soit vous, l’autre, la relation ou votre santé.
Tout contenir pour séduire et paraître une personne bien étouffe notre vie, ruine notre capital énergétique et notre capacité à nouer des relations sincères et profondes.

Florence Bierlaire

Florence Bierlaire

  • Psychothérapeute (Thérapie systémique- Hypnose Ericksonienne- ANC)
  • Sexologue clinicienne
  • DU sur les troubles du comportement alimentaire à Paris
  • Tabacologue
  • Auteure

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